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Les États généraux du numérique pour l'éducation

Avec les États généraux du numérique pour l'éducation, des propositions ont émergé pour améliorer le numérique à l'école : on vous dit tout !
10/03/20218 mins
Par Mélie Castelain
Les États généraux du numérique pour l'éducation

Le numérique n'est plus une option. C'est là le principal enseignement que nous avons tiré du premier confinement qui a brutalement plongé le monde éducatif dans l'école à distance. Dans le cadre du Grenelle de l'Éducation, des États généraux du numérique pour l'éducation ont été organisés début novembre. Quelles propositions ont émergé, comment les professeurs vivent le numérique en classe, quelles sont les failles et les réussites du système ?

Pour vous candidats au CRPE ou à un autre concours de recrutement de l'Éducation nationale, pour vous qui êtes aussi tout simplement curieux et concerné, Hupso dresse le bilan de cette grande concertation et de ses implications pour l'avenir.

Pourquoi des États généraux du numérique pour l'éducation ?

La tenue de ces premiers États généraux du numérique pour l'éducation a été annoncée en juin 2020 par le Ministre de l'Éducation nationale, Jean Michel Blanquer. Organisés dans le cadre du Grenelle de l'enseignement, ils permettent de formuler des propositions pour l'avenir, basées sur le bilan des fragilités et des réussites du système éducatif dans sa dimension numérique.

Si ces États généraux font partie du Grenelle, c'est qu'ils permettent d'interroger la condition du professeur au 21ème siècle. Dans le quotidien de l'enseignant, le numérique est devenu une thématique centrale et un outil incontournable. La stratégie numérique de l'Éducation nationale doit être globale, car elle est loin de ne concerner que le seul outil informatique. Il s'agit bien d'accélérer l'usage du numérique dans les écoles et pour cela il faut notamment :

  • Mettre en place une pédagogie propre à l'enseignement numérique pour en tirer pleinement profit.
  • Permettre aux enseignants d'accéder à un parcours de formation continue spécifique.
  • Évaluer les compétences existantes aussi bien pour les élèves que pour les professeurs.
  • Développer des outils adaptés et accessibles.
  • Améliorer la dotation des établissements.
  • Prendre la mesure de la fracture numérique pour proposer des solutions adaptées et ciblées.

Cinq grandes thématiques ont donc guidé cette réflexion collective :

  • Enseigner et apprendre avec le numérique.
  • Un égal accès au numérique pour tous.
  • Travailler ensemble autrement, culture numérique professionnelle commune.
  • Un numérique responsable et souverain.
  • Gouvernance et anticipation.

C'est autour de ces thèmes que les 40 propositions finales ont été formulées.

Comment se situe la France en termes d'utilisation du numérique dans l'éducation ?

Concrètement, notre système éducatif ne se situe pas en tête du classement européen pour ce qui est de l'usage du numérique. En effet, selon le rapport Le numérique éducatif, un portrait européen de la DEPP (Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance) nos établissements sont plutôt mal dotés, nos professeurs peu formés et les élèves se focalisent sur les usages récréatifs du numérique. Un portrait peu flatteur qu'il convient cependant de nuancer.

Le taux d'équipement, avec 20 postes pour 100 élèves au niveau national est en-deçà de la moyenne européenne :

  • Écoles, 18ème rang européen sur 24.
  • Collèges, 12ème rang.
  • Lycées professionnels, 5ème rang.
  • Lycées technologiques, 4ème rang.

La formation des professeurs est relativement peu académique. Globalement, les enseignants prennent l'initiative de leur montée en compétences, sur leur temps personnel. C'est le cas pour :

  • 61% des enseignants du primaire.
  • 70% des professeurs de collège.
  • 75% des enseignants de lycée général.
  • 78% de ceux des lycées professionnels.

Ces chiffres suivent la tendance européenne. Ce qui est plus inquiétant en revanche, c'est que le nombre d'enseignants déclarant n'avoir aucune formation à l'usage du numérique est bien plus important que la moyenne des pays européens. En effet, 29% des professeurs de primaire (contre 12 au niveau européen) ne se sont pas formés par eux-mêmes, n'ont pas été formés par un collègue, ni par une communauté en ligne ni par l'institution. Ce chiffre descend à 17% au collège, 22% dans les lycées (respectivement 5% et 10% chez nos voisins européens).

Attention cependant, cette étude a été publiée en 2014. Ces données sont donc à relativiser.

Une participation à la hauteur des enjeux de ces États généraux du numérique pour l'éducation

La situation dans laquelle se trouvait notre système éducatif lorsque l'école à distance est devenue soudainement le seul moyen d'assurer la continuité pédagogique n'était donc pas optimale. En quelques semaines seulement, les professeurs ont, souvent de leur propre initiative, trouvé des solutions pour éviter le plus possible les décrochages et faire avec une très grande disparité d'équipement parmi les élèves. Créer des ressources pédagogiques adaptées, s'équiper soi-même... Dans l'urgence, il a fallu tenir.

De ces États généraux du numérique pour l'Éducation doivent naître des axes concrets de travail pour que le numérique ne soit plus un problème mais un atout.

Leur organisation s'est fait en plusieurs phases, sur une durée de 4 mois :

  • Concertation auprès de la communauté éducative.
  • Consultation nationale sur une plateforme participative.
  • Dans chaque région académique, des États généraux territoriaux ont été organisés (du 14 septembre au 16 octobre 2020). Au total, cela représente plus de 200 rencontres en territoires et 380 articles rédigés par les académies.
  • Journées nationales des États généraux du numérique pour l'Éducation (4 et 5 novembre 2020 à Poitier), suivies par 10.000 personnes à distance.

La participation a été à la hauteur des enjeux. Les chiffres parlent d'eux-mêmes :

  • 97.924 visiteurs, à 94% français, et 243.589 visites provenant de 123 pays sur la plateforme participative.
  • 26.839 répondants au questionnaire en ligne. 42% d'entre-eux sont des professeurs, 29% des parents d'élèves, 15% des élèves, 8% des personnels d'encadrement et enfin les 6% restants représentent les autres agents.
  • 2107 participants à la concertation en ligne, 668 propositions reçues.

Cela nous montre bien l'intérêt que la question du numérique suscite au sein de la communauté éducative élargie et même au-delà de nos frontières nationales et européennes. Partout les professeurs, parents, élèves et agents se sont mobilisés pour avancer des pistes concrètes. 

(Source de ces données chiffrées : Eduscol)

Quelles sont les 40 propositions issues des États généraux du numérique pour l'éducation ?

Plusieurs axes de travail sont envisagés, et pour chacun des pistes plus précises se détachent. Nous reprenons ici la liste des propositions présentée par le Ministère de l'Éducation nationale.

Mettre en place de nouvelles formes de gouvernance et de nouveaux outils d'anticipation

Gouvernance

1 - Organiser une nouvelle gouvernance plus participative au niveau national et dans les territoires
2 - Créer une concertation ouverte pour prolonger la dynamique des EGN
3 - Démontrer / tester le déploiement du numérique dans les territoires

Anticipation

4 - Mettre en place un plan de continuité d’activité administrative et pédagogique
5 - Renforcer l’attractivité pour tous et la féminisation des filières et des métiers du numérique à travers une campagne de sensibilisation nationale

Enseigner et apprendre le numérique et avec le numérique

Enseigner

6 - Renforcer la formation initiale et continue
7 - Certifier les compétences numériques des professeurs avec PIX
8 - Diversifier les modes de formation au et par le numérique et conforter la place de Réseau Canopé
9 - Créer un compte ressources et services numériques pour chaque enseignant
10 - Favoriser les projets associant chercheurs et enseignants pour une conception collaborative d’outils adaptés aux besoins de la communauté éducative et une analyse de leurs usages

Apprendre

11 - Développer des dispositifs et des services de télérenseignement et de soutien à distance gratuit pour les élèves et conforter la place du CNED
12 - Développer la citoyenneté numérique et renforcer l’éducation aux médias et à l’information en s’appuyant sur le CLEMI (centre pour l'éducation aux médias et à l'information)
13 - Certifier les compétences numériques des élèves avec PIX
14 - Concevoir un espace numérique personnel pour l’éducation et l’orientation (portfolio des compétences des élèves) en s’appuyant sur l’ONISEP

Garantir un égal accès au numérique pour tous / lutter contre la fracture numérique

15 - Mettre en place un dispositif pour détecter et prévenir la fracture numérique et l’illectronisme
16 - Fournir une aide ciblée à l’équipement numérique des élèves
17 - Fournir une aide à l’équipement de tous professeurs
18 - Garantir un socle numérique minimal pour les écoles et les établissements
19 - Mettre en place le "Pass’ connexion éducation" pour tous
20 - Développer des outils numériques spécifiques et des tiers-lieux ouverts pour les lycées Professionnels
21 - Accompagner et former les familles à la culture numérique en valorisant le PIX pour tous
22 - Mettre en oeuvre le référentiel d’accessibilité spécifique pour les ressources numériques éducatives

Travailler ensemble autrement et promouvoir une culture numérique professionnelle commune

23 - Généraliser un environnement numérique de travail pour tous les personnels avec des outils de travail collaboratifs
24 - Encourager la mutualisation au niveau national de services numériques développés en territoire
25 - Créer des dispositifs d’accompagnement des cadres pour organiser le « travailler ensemble »
26 - Créer des dispositifs d’accompagnement pour l’animation des communautés éducatives et des collectifs de personnels
27 - Mettre en place des démarches et des outils participatifs au sein des écoles et établissements
28 - Renforcer et mieux reconnaître les acteurs du numérique dans les territoires

Favoriser le développement d'un numérique responsable et souverain

Responsabilité

29 - Faciliter et encourager l’utilisation de matériels recyclés
30 - Former aux bons usages et à la sobriété numérique et promouvoir et former à la bonne utilisation des outils conformes aux RGPD

Sécurité

31 - Renforcer le cadre de confiance autour du Code de conduite pour les entreprises de la filière

Innovation

32 - Aider les laboratoires de recherche et assurer le transfert des innovations
33 - Lancer des challenges de l’innovation
34 - Créer des accélérateurs de la diffusion de solutions innovantes

Interopérabilité

35 - Définir un cadre général d’interopérabilité
36 - Intégrer le programme européen GAIA-X, cloud souverain pour l’hébergement des données scolaires
37 - Créer "l’Education Data Hub", la plateforme de données d’éducation Encourager l’utilisation de logiciels et de ressources éducatives libres

Socle

38 - Encourager l’utilisation de logiciels et de ressources éducatives libres

Propositions communes à plusieurs thématiques

39 - Mettre en place des tiers lieux ouverts

40 - Promouvoir l’offre numérique française et appuyer son développement à l’international

La French Tech au service de l'écosystème éducatif

Au-delà des murs de nos établissements scolaires, c'est la société française dans son ensemble qui pourra bénéficier de cette impulsion : seules quelques années séparent l'écolier du citoyen de demain. Et le rôle de l'école, après tout, n'est-il pas de donner aux élèves les clés qui leur permettront de décoder le monde qui les entoure ? Et de s'y épanouir ? Il paraît évident que ce monde sera (s'il n'est pas déjà) celui de l'ère numérique. La formation professionnelle est également en pleine transition (consulter notre article dédié : Quelles tendances pour l'éducation numérique ?), les secteurs primaires, secondaires et tertiaires ont depuis des années déjà adopté des process très innovants et totalement (inter)connectés.

Au sein de la French Tech, le mouvement français des startups, nombreuses sont les sociétés qui développent des outils numériques pédagogiques innovants. Certains ont déjà conquis nos classes. L'Inria (institut national de recherche en sciences et technologies du numérique) déplore d'ailleurs que l'Éducation nationale ne sache pas profiter pleinement de ces talents. L'institut a d'ailleurs formulé 7 recommandations relatives à la transformation numérique de l'éducation, qui touchent la société dans son ensemble :

  • Développer des projets de recherche des sciences du numérique au service de la réussite scolaire.
  • Développer des méthodologies rigoureuses pour l'évaluation du numérique éducatif.
  • Passer à l'échelle dans la formation des enseignants.
  • Vers une "université citoyenne et populaire du numérique" apte à assurer la formation pour tous et pour toutes au numérique.
  • Créer les conditions de développement et de la mise à jour des ressources éducatives numériques comme des biens communs.
  • Garantir la portabilité des données personnelles éducatives et développer l'interopérabilité des solutons logicielles.
  • Créer un observatoire des EdTechs.

Ce qui est en jeu, c'est in fine la compétitivité des diplômés des écoles françaises mais aussi celle de nos entreprises. On ne peut plus aujourd'hui faire l'économie de la question du numérique, que ce soit dans l'éducation ou dans la société. 

Ces recommandations sont disponibles dans un livre blanc de 137 pages.

Acteur de la French Tech, Hupso place le numérique au coeur de sa pédagogie. Plus d'infos sur notre école.

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Mélie CastelainRédacteur de contenus

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